Viande Humaine



Le chippendale gavé de stéroïdes, muscles monstrueux luisant d’huile, astique sa queue longue comme un avant-bras, si raide qu’on la croirait sculptée dans un morceau de bois, surnaturellement épaisse, violacée, aux veines énormes et sinueuses. Il se branle contre le visage du vieillard qui continue d’éructer, rouge, congestionné, bavant, les yeux exorbités. Lui aussi a sorti son sexe. Il agite par habitude entre ses doigts tordus d’arthrite le morne bout de chair sentant la pisse et la sueur mais n’éprouve plus rien depuis longtemps. Incapable de se résoudre à ce que le miracle ne se produise pas, ne se produira plus jamais, il branlotte avec l’énergie du désespoir, du moribond, ce bout de peau vide de chair pas plus gros que le prépuce du monstre bourré d’hormones qui grogne comme un ours en lui martelant le visage de sa matraque de chair. Le grabataire braille de sa voix désagréable, trop aiguë, mal timbrée. Il gueule, invective, insulte jusqu’au délire, perd la tête : désormais la seule façon pour lui de prendre son pied. La scène se déroule dans un salon d’une cinquantaine de mètres carrés meublé et décoré en style Empire, aux murs plus couverts de tableaux qu’un musée. Par les portes-fenêtres on aperçoit, au bout d’un parc parfaitement entretenu, une profonde forêt surplombée d’un ciel gris cadavre.


Extrait du roman Images de la fin du monde (Au diable vauvert), par Christophe Siébert. Actuellement en librairie.
Infos et détails : Mertvecgorod








 
 

Bad to the Bone – Viande Humaine

Texte : Christophe Siébert. Le chippendale gavé de stéroïdes, muscles monstrueux luisant d’huile, astique sa queue…

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