Brigade Rouge Poésie Noire,
festival des terrains esthétiques glissants

Avec quatre mots évocateurs pour seul manifeste : Brigade Rouge Poésie Noire, on a d’un côté le hardcore, la violence, le brut de décoffrage, la face sombre qui flirte avec le pire. De l’autre, la dimension lumineuse avec des histoires d’émancipations, des extases créatrices, des élévations profanes, des visions métaphysiques… En l’espace d’un week-end, on s’est ainsi retrouvé à visionner dans la foulée l’horrifique et ultra-dérangeant Free as dead (2015) par deux harsh noiseux, Andy Bolus et Romain Perrot, qui ont réalisé une sonorisation live pendant leur projection, et une trilogie de films hilarants par Katrina del Mar (Gang Girls 2000 (1999), Surf Gang (2005) et Hell on Wheels Gang Girl Forever ! (2010)) donnant champ libre à un gang de motardes lesbiennes, surfeuses, skateuses qui transgressent un à un les clichés de la virilité et de l’héroïsme masculin tel qu’Hollywood nous en fait ingurgiter en masse. On retient aussi le Mod Fuck Explosion (1994) de Jon Moritsugu, odyssée à la sauce punk avec une bande-son qui vaut un concert dans la fosse. L’odeur de bière semble transpercer l’écran, quand ce n’est pas celle, fétide, des centaines de kilo de viande qu’il a fallu réunir par l’avant-dernière scène, onirique et dark, contraignant l’équipe du tournage à porter des masques à gaz. Seul film d’animation du festival, Vapo Mambo (2022) de Louise Mervelet & Stanislas Parvzel se déguste comme un bol de nouille servi sur un plateau par la mort en écoutant divaguer deux organes sous amphét'. Pour finir, Brigade Rouge Poésie Noire peut se targuer d’avoir fait déplacer l’écrivain américain Dennis Cooper (Fol Marbre, Jerk…), au demeurant vivant la moitié du temps à Paris mais du genre à se faire discret, figure du queercore et co-réalisateur avec Zac Farley de Permanent Green Light (2018) projeté en ouverture
Pour ce festival qui comporte « beaucoup de films et un peu de musique », en réalité la musique constitue un leitmotiv dont on ne démord jamais entre bandes son hyper rythmées et immersion dans des sous-cultures comme la scène punk, metal, rave, noise… C’est une des dimensions de la ligne très claire de Brigade Rouge Poésie Noire. L’enjeu pour cette 1ère édition d’un festival émergeant et sans un rond, a surtout été de ménager désirs et faisabilité. Par exemple, il a pu y avoir des renoncements sur la location de films qui, tout en étant cultes dans un contexte underground, coûtent en réalité cher à se procurer auprès des réalisateur·ices et distributeur·ices. Pour mettre la main sur certains, l’équipe du festival qui ne pouvait s’engager sur de grosses sommes a notamment misé sur la cote de rareté des propositions. C’est le cas de « Gang Girl Trilogy » de Katrina Del Mar dont le dernier des trois films n’avait encore jamais été projeté en France. « Au final, quand on se lance dans l’organisation de ce type d’événement sans aucun moyens, tout le pari repose sur le public et sa réception. Cela peut demander beaucoup d’effort, mental et physique », souligne l’équipe. Et le succès de Brigade Rouge Poésie Noire a pu se mesurer aux séances plusieurs fois complètes ainsi qu’aux sourires qu’affichaient les personnes devant Treize. En attendant une peut-être seconde édition, on a posé quelques questions à Andres Komatsu, en fer de lance de Brigade Rouge Poésie Noire.

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